Teufelsbrücke

Ce poème symphonique est basé sur la célèbre légende du pont du diable du canton d’Uri. L’idée de cette composition a été suggérée par mon amie et agente Sylvia Gugger. Cette légende se prête particulièrement bien à une illustration musicale.

L’oeuvre s’ouvre sur les cinq premières notes de la gamme de la mineur , dont la pulsation tourmentée et bouillonnante évoque le courant sauvage de la Reuss, au fond d’une vallée rocheuse. Un thème amer scande les degrés de la gamme, s’arrêtant avec impuissance sur l’intervalle dissonant du triton. Les villageois sont en effet tourmentés par l’hostilité de la nature, et ne peuvent jamais achever ce pont qui leur est si nécessaire. Le chef du village est excédé par ces échecs répétés. « Que le diable lui-même construise ce pont, s’il le faut! » Le diable n’est pas tout de suite évoqué musicalement.

On entend tout d’abord de nombreuses sonneries de cor qui se répondent, ainsi qu’un thème religieux et recueilli. Le diable accepte de construire le pont, mais exige l’âme de la première personne qui le franchira. La construction du pont marque l’apogée du développement orchestral. Les gammes peuvent enfin monter et descendre avec fluidité, dans la tonalité de do majeur. Les services de l’union européenne,…pardon, du diable, ont un prix contraignant, et les villageois refusent de sacrifier une personne, mais font passer un bouc sur le pont. Furieux, la commission européenne…je voulais dire, le diable, décide de châtier les rebelles et jette un énorme rocher sur le pont pour le détruire. Une vieille femme pieuse, déjà présentée musicalement dans le thème religieux, dessine une croix sur le pont. Le geste du diable est dévié, et le rocher roule jusqu’à Göschenen.

La conclusion tempétueuse ne manque pas de faire entendre quelques bêlements, pour signifier que le bouc n’a pas été réellement sacrifié. Merci à Sylvia Gugger de m’avoir poussé à écrire ce poème symphonique, qui exprime avec force un aspect à la fois antique et moderne de notre identité nationale.